La politesse dans le digital

Posté le 14/09/2022 - lecture 9min

La France est mondialement reconnue pour son savoir-vivre, depuis le règne de Louis XIV. Cependant, les règles de "L'art de vivre à la française" ont beaucoup évolué au cours des derniers siècles. L'apparition de nouveaux codes sociaux, la remise en cause des concepts préétablis semblent avoir aussi eu une incidence sur nos modes de communication, dont le savoir-vivre. Entre pandémie et hyper-digitalisation de la société, comment la politesse a-t-elle évolué derrière les écrans interposés ?

 

Si les règles de politesse sont, dans une certaine mesure, le reflet déformé mais reconnaissable d'une société, souhaite-t-on vraiment poursuivre dans cette voie ?

Ne serait-ce pas le moment pour nous de prendre un peu de recul et d'utiliser le digital pour redessiner le savoir-vivre français ?

 

La politesse en 2022, qu'est-ce que c'est ?

La politesse, ce n'est pas simplement un principe expliqué aux enfants ! Quelques chiffres pour commencer notre réflexion :

 

En octobre 2003, une grande enquête d’opinion réalisée par Figaro Madame révélait que les bonnes manières étaient jugées "particulièrement importantes" pour 70 % des Français. En 1981, ce chiffre était de 21 % et de 53 % en 1990.

85 % des Français placent le savoir-vivre comme l'une des qualités les plus indispensables à transmettre aux jeunes générations (étude Ipsos pour l'assureur La France Mutualiste, jeudi 11 avril 2019).

La politesse est alors la 3ème qualité la plus importante que les adultes devraient transmettre aux enfants (étude Ipsos 2021)?

 

Ce n'est pourtant pas seulement une question de génération puisqu'en juin 2017, une étude réalisée par l’IFOP sur 1003 personnes de 15 à 22 ans, plaçait le respect et la politesse en tête des qualités les plus importantes pour ce panel.

 

Lavazza s'est aussi penchée sur les dix compétences ou "soft skills" les plus appréciées au travail. Le comportement : la courtoisie (politesse, respect, amabilité) arrive en 4e position avec 81 %, suivie de près par l'intégrité (honnêteté) avec 79 % puis l'optimisme (enthousiaste, sociabilité...) avec 74 %. Plus des 2/3 des cadres (67 %) du secteur public ou privé estimaient que les "soft skills" étaient encouragées dans leur entreprise et ses modes de fonctionnement.

*L'étude a été menée par Lavazza et IFOP, avec un panel de 1001 personnes, du 3 au 9 septembre 2019.

 

Politesse et bonnes manières, quelle différence ?

On pourrait également se poser la question de ce que l'on entend par "politesse" ou "bonne manières" ?

Dans le langage courant, cette notion correspond à toute une série de synonymes approximatifs : civilité, savoir vivre, bonnes manières, bien séance, bon genre... Différents termes qui désignent une certaine façon d’être et d’agir en société, ainsi que les usages qui déterminent la manière dont il faut se comporter pour être considéré comme une personne polie et bien élevée.

 

La politesse peut alors avoir de véritables fonctions sociales en permettant :

  • l'intégration dans un groupe,
  • la distinction par rapport aux autres groupes,
  • la hiérarchisation des individus au sein d'un groupe,
  • la régulation des comportements dans les groupes afin de prévenir, ou résoudre des conflits.

 

Si toutes ces fonctions étaient valables autrefois, on pourrait peut être y ajouter qu'une notion plus contemporaine vient nuancer nos propos : la distance sociale qui peut être mise entre les membres d'un groupe. 

 

Ces fonctions évoluent au cours du temps. La politesse, les modes et les usages, les formes, les règles, les rites du savoir-vivre sont l’objet de variation permanentes, parfois très rapides. Il suffit de prendre l'exemple du tutoiement/vouvoiement ou encore la façon de se saluer postpandémie.

 

Un peu d’histoire, s'il vous plaît : la politesse à la loupe

 

« Sans la politesse, remarquait l’essayiste Alphonse Kair au milieu du XIXe, on ne se réunirait que pour se battre. Il faut donc, ou vivre seul, ou être poli. » Ainsi, d'une manière ou d’une autre, la politesse existe dans toutes les sociétés humaines, dans tous les pays. Elle a pourtant connu de profondes mutations au cours du temps. La politesse, elle aussi, a son histoire.

 

D'après le livre "L'histoire de la politesse" de Frédéric Rouvillois, différentes grandes périodes se dessinent :

  • 1789 - crise au cours de laquelle les plus radicaux tenteront de faire disparaitre la vieille civilité française. La chute de Robespierre et l'arrivée de Bonaparte au pouvoir = condamnation de cette anti-politesse jacobine et réaffirmation de règles du savoir-vivre classique.
  • 1800 à la Première Guerre mondiale - âge d'or de la politesse bourgeoise. Les règles du savoir-vivre sont de plus en plus complexes, exigeantes et rigides. Elles se diffusent jusque dans des couches relativement modestes de la société. Certaines pratiques apparaissent (fumoir, réception à jour fixe, baisemain), tandis que d’autres tendent à disparaitre (corbeille de mariage), à se simplifier ou au contraire à se compliquer et s’alourdir (règles sociales de politesse relatives à un deuil).
  • 1914 - le déclin de la bienséance bourgeoise résulte en particulier de la remise en cause des conditions matérielles et psychologiques qui avaient permis son essor tout au long du siècle précédent. Simplification des usages, disparition de certains d'entre eux, ceux qui sont devenus impraticables ou qui paraissent illégitimes.
  • Début des années 50' - ère des incertitudes : d'un côté le mouvement de construction initié durant l'entre-deux-guerres se poursuit, d'un autre, le nombre de groupes sociaux respectueux des usages et du savoir-vivre traditionnel décroit progressivement.
  • 1990 - prise de conscience de leur importance et apparition de nouvelles règles de bienséance. 
  • 2020 - la pandémie bouscule tous les codes. Les masques, la façon de se saluer, de se toucher. Le digital prend alors une nouvelle place et s'intègre dans le quotidien de tous. Tous les codes sont alors à réinventer.

 

 

Merci aux écrits et à la fameuse "nétiquette"

Au XIXe siècle, on publie plusieurs centaines d'ouvrages consacrés, plus ou moins directement, au savoir-vivre. Codes, manuels, traités, guides, sont généralement rédigés par des dames et principalement destinés à un public féminin. On pourrait penser que ces manuels ne font plus partie de notre quotidien. Et pourtant ! 

 

Aux débuts d’Internet, on trouvait majoritairement des informaticiens travaillant en ligne ou échangeant des informations via les forums et listes de diffusion. Ces spécialistes connaissaient le fonctionnement d’Internet et savaient quelles informations pouvaient être lues et par qui. Les e-mails, par exemple, n'avaient pas de caractère secret ou confidentiel. Qu'ils soient lisibles par des personnes tierces comme des cartes postales était alors possible et même logique. Les abréviations utilisées par les informaticiens étaient connues des autres membres de la communauté.

Alors, lorsque internet est devenu de plus en plus accessible, les nouveaux utilisateurs ont cherché à s'adapter, mais n'ayant pas les bons codes techniques, le digital s'est simplifié. Internet s’est libéré de nombreux aspects techniques pour devenir finalement accessible au plus grand nombre d'usagers. C'est donc le contenu qui est devenu plus important, donnant naissance par nécessité au concept de « nétiquette » : le meilleur moyen de donner aux néophytes une ligne directrice à suivre.

 

Le premier document officiel définissant les règles de la nétiquette fut la RFC 1855, rédigée par Sally Hambridge (de chez Intel) pour l'Internet Engineering Task Force, et diffusée en octobre 1995. Les première nétiquettes comprenaient, non seulement un ensemble de règles de conduite, mais également des informations sur la sécurité et la protection des données.

La nétiquette fournissait alors des informations sur la façon de mener des discussions sur les forums en ligne, de gérer les contenus protégés par le droit d’auteur et de se protéger face aux spams, entre autres choses.

Le concept de nétiquette s’est ensuite développé. La majorité des règles de base des années 1990 est toujours valide plus de 30 ans après leur rédaction. L’accent a pourtant été mis sur les modes de communication, au détriment des aspects techniques, notamment pendant les deux dernières décennies.

 

Les pouvoirs de la nétiquette

 

Nétiquette est un néologisme créé à partir du mot anglais « net » pour Internet et « étiquette », c’est-à-dire "bonnes manières", "courtoisie". La nétiquette est donc l’ensemble des règles de politesse en ligne, sorte de "Manuel de savoir-vivre" pour mener une discussion sur Internet.

Des règles de politesse régissent aussi la bonne conduite de nos vies quotidiennes. Lorsqu'une personne vous dit « Bonjour ! », vous la saluez en retour. Lorsque quelqu’un vous suit, vous lui tenez la porte. Il existe alors tout simplement des règles non-écrites similaires pour les communications en ligne.

Il s’agit d’une "charte de bonne conduite" qui n’a pas force de loi mais qui est en vigueur dans la plupart des espaces digitaux. En enfreignant ses règles, vous ne risquez pas de poursuites judiciaires. À une exception près : si vous commettez une infraction pénale en ligne, par exemple en incitant à la violence, vous devez vous attendre à être poursuivi, quelle que soit la nétiquette en vigueur dans la communauté digitale.

 

Il n’existe pas de nétiquette commune à toutes les plateformes du web. C’est le rôle des modérateurs de chaque site de déterminer quelles règles spécifiques de savoir-vivre s’appliquent dans leur forum, leur espace membre ou sur leurs réseaux sociaux.

 

La politesse dans le digital, un impératif

Peu de gens s'intéressent à la nétiquette, et le nombre de personne qui lisent réellement les chartes est très faible.

Ce n'est pas nouveau. Les règles n'ont jamais été suivies avec entrain, même lors des époques les plus "strictes" sur les convenances, et même dans les strates les plus élevées de la société. Certains fondamentaux, se confondant avec la morale, semblent universels et immuables, comme le fait de se saluer, d'une manière ou d'une autre. Les autres en revanche, se déclinent de façon plus ou moins complexes et raffinées, en fonction des structures sociales, politiques, économiques, religieuses ou idéologiques en vigueur dans un lieu et à une époque donnés.

 

Avec l'arrivée du web, plus expérientiel, il devient donc important de ne pas seulement écrire ces règles mais de les renouveler !

La relation client et la politesse

Alors que le monde se digitalise chaque jour un peu plus, et que les relations deviennent de plus en plus virtuelles, on pourrait penser que les contraintes sociales s'amenuisent. Il n'en est rien.

On pourrait imaginer que la façon de s’exprimer importe peu et que seule la vitesse de réponse compte pour le client. Pourtant, les clients accordent une importance toute particulière à la politesse dans la relation client et ses échanges, qu’il s’agisse d’une interaction web, d'un coup de téléphone ou d'un dialogue en magasin.

 

Que ce soit au sein même de votre entreprise ou avec vos clients, la politesse doit être de mise car elle améliore les relations et laisse une impression agréable. Elle prouve le respect et la considération que vous avez pour vos clients : deux éléments primordiaux pour une relation de qualité.

Instaurer un climat de travail agréable est déjà un premier par pour améliorer la relation avec les clients : vos équipes seront beaucoup plus détendues et plus à même de considérer le client.

 

Même derrière l'écran de votre ordinateur, vous devez maintenir les mêmes notions qu'en présentiel : écoute, courtoisie et respect.

De plus, dans une discussion orale ou en présentiel, il est généralement assez simple d'appréhender les malentendus. Or, dans la communication virtuelle, les malentendus et les incompréhensions peuvent être nombreux. Veillez alors à être le plus clair possible et  à bien reformuler vos propos s'ils n'ont pas été parfaitement compris. Le temps de réaction ou "temps de réponse" est un autre point très important. Les clients qui vous contactent virtuellement le font souvent parce qu'ils ne veulent pas perdre de temps à appeler votre service client. Soyez donc le plus rapide possible ; répondez dans un délai bref car si vous le faites patienter trop longtemps, l’interlocuteur peut se vexer et avoir une mauvaise image de votre entreprise.

 

Pour finir, n'oubliez pas qu'une conversation ne concerne pas seulement l'émetteur et le locuteur mais bien toutes les personnes qui y assistent. Veillez donc à votre image, à votre présentation et à bien respecter l'autre. Prenez garde à ne pas faire de fautes d’orthographe ou de grammaire, cela pourrait renvoyer une mauvaise image au client ou au prospect.

 

Les bénéfices perçus des soft skills

La transformation digitale des entreprises poursuit son chemin, avec l’arrivée en force de l’intelligence artificielle, une très forte compétitivité... Les cadres sont alors persuadés que miser sur les soft skills pourraient permettre à leur entreprise de surmonter les enjeux actuels, et de relever les défis de demain. Mais les soft skills elles ne sont pas seulement bénéfiques à l’entreprise !

L’importance accordée à ces compétences comportementales est également vue comme une chance d’élargir ses compétences et de s’épanouir (86 % des cadres jugent que les entreprises doivent proposer des formations en ce sens). Ils sont même 92 % à penser que ces compétences devraient être prises en compte lors de leur évaluation annuelle (Lavazza et IFOP).

 

 

Pour aller plus loin...

Les plateformes kolivi agora ne sont pas de simples outils. Elles sont de vrais vecteurs de changement. Convaincu que les nouveaux codes de demain doivent être proposés et adoptés en parallèle des outils, les équipes kolivi peuvent vous accompagner sur ces sujets.

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